mercredi 6 avril 2011

Touch de Morton Subotnick

Chroniques CD : Touch  Morton Subotnick, 1969, Part I 14'52; Part II 15'26.  


C'est virtuose et ça date de 1969, maîtrise des objets sonores percussifs,  cette polyrythmie avec une note tenue pas totalement identifiable, qui pourrait être jouée par un cuivre mais qui prend de la consistance, et s'identifie avec le découpage de l'enveloppe en note électronique synthétique. Le résultat est étonnant et prouve pour cet enregistrement de 1969 la maîtrise de Morton Subotnick de sa musique. 
L'introduction de la seconde partie de Touch est aussi virtuose. Là où il y avait luxuriance de timbres, de rythmes s'interpénétrant, Morton Subotnick joue sur les silences, les intensités, les dynamiques. Il faut se concentrer pour saisir les infimes variations, subtiles, légères, délicates, évanescentes du jeu de Subotnick. 
Tel que je l'écoute, sur une vraie chaîne hifi, à tubes, Touch m'apparaît comme utilisant en partie la grammaire, le langage de l'électroacoustique. Le final, tel un choeur s'estompe doucement, se dissous de lui-même. Les deux parties de Touch indique Morton Subotnick dans ses notes, ont été entièrement réalisées à l'origine avec le synthétiseur analogique créé par Don Buchla en 1963, le Buchla serie 100. Avec toutefois, une exception, il y a une voix de femme qui lit trois syllabes t-ou-ch dans différentes parties de la pièce. Ainsi, dans la première partie la lecture est rapide, lente et rapide (fast-slow-fast) et la structure est inversée dans la partie 2 où elle lente-rapide-lente (slow-fast-slow. 
Touch, indiquent les notes du CD,  a été enregistré sur un magnétophone à 4 pistes alors qu'il venait d'émigrer chez Colombia/CBS  (où étaient Bob Dylan et Miles Davis) afin d'être diffusé en quadriphonie. Et il s'est vendu quand même à 40000 exemplaires. 
On retrouve Touch sur deux albums, Morton Subotnick avec aussi Silver Apples of the Moon sur lequel je reviendrai et The Wild Bull, le second CD comprend aussi Jacob's Room.
                                                                                                               Didier Debril

PS : J'ai eu la chance de rencontrer Morton Subotnick en 1981 à l'Ircam lors du stage d'été de 40 jours. Morton nous avait présenté son Buchla et montré sa création qu'il préparait sur la 4 C, Ascent to Air.  Elle a été créée par l'Ensemble Intercontemporain, dirigé par Peter Eötvos,  dans l'espace de projection de l'Ircam le 18 janvier 1982. Ascent to Air est une oeuvre pour dix instrumentistes et bande.
Ce jour là, j'ai immortalisé cette rencontre en photographiant Morton Subotnick. Les photos sont ici. Morton Subotnick a repris le lien, d'ailleurs, "Morton Subotnick at IRCAM (1979-1981)" sur son site (http://www.mortonsubotnick.com/viewing.html), dans le bas de la page consacrée aux archives photos et vidéos, entre "Parades & Changes" et "Morton Subotnick's Jacob's Room". Pour la petite histoire, quand j'avais vu le Buchla de Morton Subotnick j'avais été très impressionné. Et je m'étais dit qu'un jour j'aurais un synthétiseur de Don Buchla. Trente ans plus tard, j'ai réalisé mon rêve. 
       
Ma discographie de Morton Subotnick :
Silver Apples of the Moon Parts A & B, 1967
The Wild Bull, Parts A & B, 1968.
Ed. Wergo

Touch, Parts I & II, 1969
Jacobs' Room, Parts I & II, 1986.
avec Joan La Barbara (soprano), Erika Duke (cello).
Ed. Wergo

Electronic Works I
Touch for 4-channel Tape , 1969
A Sky of Cloudless Sulphur, for 8-channel tape, 1978
Opening
Dance
Gestures : It Begins with Colors, 1999-2001
Joan La Barbara, Voice
Mode Record

Electronics Works Vol. 2
Slidewinder, for 4 channel-tape
Side One & side two, 1971
UntilSpring, for 4-channel tape
Side One & Side two, 1975
Mode Record

The Key to song, 1985
Retour - a triumph of reason, 1986
Realized on the Yamaha Computer.  Assisted Music System : YCAMS
New Albion Records

And the Butterflies Begin to Sing
for String Quartet, bass, Midi Keyboard, and Computer, 1988
New World Records

Un DVD Morton Subotnick
Sidewinder
Until Spring

Notes d'écoute prises sur le vif :

Je préfère "Touch" plutôt que Silver Touch, avec sa sonorité de bois (plus marimba que xylophone) plutôt que métallique est réellement virtuose dans ses deux parties. Plus diversifié aussi dans son développement, tant dans la diversité des timbres que des dynamiques, des durées (8'; 9' avec une lente évolution allant vers une sonorité presque cuivrée) et qui débouche sur une polyrithmie très variée sous, encore cette note évolutive très cuivrée. Impressionnant. 
J'adore l'introduction de la partie 2, simple en apparence, mais avec un rendu superbe. Là aussi, Morton Subotnick joue sur un développement très subtil, comme avec une écriture orchestrale  jouant sur les subtilités timbrales autant que sur les dynamiques. Il faut prêter l'oreille, tout est en finesse. 7'30, comme des percussions qui vont de plus en plus  vers la prolifération, pour atteindre cette polyrythmie qui prend son élan ver 9'30 - interrompu des variations autour des voyelles Touch -  pour aboutir à une sorte d'apothéose rythmique. 

J'aime "Jacob's Room" avec Erika Duke (violoncelle) et Joan La Barbara (soprano).

J'ai eu plus de mal avec Silver Apples of the Moon mais j'ai appris à l'aimer. En fait, j'ai trouvé, c'est le début de la première partie que je n'aime pas trop. Car trop, comment dire FX. Il y a de bonnes choses, bien entendu mais je le trouve moins abouti - c'est une façon de parler - par rapport à Touch. Ou plutôt moins composé. Mais il est vrai aussi qu'il est antérieur à Touch. Silver Apples of the Moon date de 1967 tandis que Touch date de 1969. Il est vrai aussi que dans la première partie, vers 8', on retrouve un développement qui m'intéresse plus, sur un tempo lent, un jeu, une évolution de timbres différents Prélude peut-être à Touch ? Ou peut-être à The Wild Bull.
Mais tout dépend comment on voit le Buchla, sa façon de composer avec. Pour ma part, j'aime que la musique électronique puisse avoir des diversités de timbres (continus, percussifs, boisés, métalliques), qu'il soit comme un orchestre avec des dynamiques, et que cette diversité soit orchestrée. 
Il y a dans la seconde partie de Silver Apples of the Moon, un rythme assez jouissif, primal, comme une sorte de bachanale. Vers 6-7' avec en contrepoint la montée en fréquences. D'aillleurs, quand elle s'arrête, elle fait place aux rythmes, avec des notes en sorte de riffs. 

The Wild Bulll est intéressant, très différent. Dans la part 1, Vers 5', avec ce travail sur ce timbre très doucereux, comme une sorte d'orgue, puis cette basse qui impulse le rythme avec en contrepoint un développement quasi jazzistique, c'est très intéressant. 


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